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27 février 2012

Les délires ardents du chevalier Craenhals

Titre  :  Chevalier Ardent : "La dame aux yeux pers"Bete yeux pers -7 - copie

L'auteur : François Craenhals

l'Editeur : Le Lombard/Revue Tintin

La date : n° 1205, 1971

 La page/la case :  case 7 et 8, p. 8 du récit

Le contexte :

Je crois que j'ai découvert Chevalier ardent à l'âge de lire, vers mes 7 ou 8 ans (donc 1977), dans la revue Tintin n° 1205 datée 1971. (avec Tounga et l'auroch en couverture !)

Dans ce numéro figure un récit assez étrange, où notre héros, dans un délire à la fois féérique et angoissant, (donc plutôt onirique), tombe nez à nez dans un défilé pierreux et parsemé d'énormes épines avec un chevalier à la tête de lion quelque peu agressif. ("La dame aux yeux pers")
Un combat s'engage, et lorsque ce dernier est battu, Ardent lui retire ce qui semble être son masque, ...pour découvrir une tête hideuse, sans oreilles, brulée au troisième degré.
Autant dire que ce genre d'image reste gravée lorsque l'on est enfant.

Il est de cet épisode, comme de beaucoup d'autres épisodes de Chevalier Ardent, où la magie cotoie des univers psychédéliques, souvent liés à des cauchemars, des fièvres, ou des drogues que l'on a administrées au héros. (Voir couverture de 1968 à droite plus bas, et (2))

Ici l'auteur nous conte en fait la découverte d'une communauté restreinte vivant en vase clôt sur une parcelle de terrain cachée derrière un rempart rocheux.
Au centre de cette communauté : un chevalier revenu de croisade brulé,  que sa dame croyait mort. Celle-ci devenu folle de chagrin imagine vivre dans un conte de fée et reçoit son amant avec la tête de lion qu'il s'est fabriqué; comme un héros de conte.
Ce dernier l'isole alors avec sa cour afin de continuer à jouer le jeu.

bete aux yeux pers 1Si François Craenhals, l'auteur/dessinateur alors agé de 45 ans n'a commencé cette série originale qu'en 1966, (voir le lancement dans Tintin) avec une histoire complète contant les origines de son jeune chevalier ("le Prince noir", repris en album en 1970 seulement), cela fait 16 ans déjà qu"'il exécute des dessins et des petits récits (westerns souvent), et sa série phare "Pom et Teddy" dans le journal de Tintin.
Mais il en a marre et, féru de chevalerie, il est enfin mûr pour franchir le pas d'une série plus originale et adulte.(1)

On l'en remercie, car lorsque l'on replace celle-ci dans le contexte des séries classiques franco-belge touchant au moyen âge, il  sans dire que Chevalier Ardent fait partie des meilleures.
Les Funcken avaient créé le Chevalier blanc. Il y avait eu aussi Harald le viking...
La référence américaine (1937) de Prince Valiant  était bien sûr dans les esprits, mais quelle autre série franco-belge, à part Bohémond de St Gilles (plus tardive, 1976 par Juillard), pourrait faire concurence dans ces années là ?

Les récits sont nerveux, débutent souvent sur les chapeaux de roue, les intrigues sont noueuses, et le héros, fougueux (ardent !), possède une attitude peu commune dans la bande dessinée, prêt à faire feu de tout bois, au péril de sa vie souvent, ou de son honneur.

Il est d'ailleurs à remarquer les relations étranges qu'il entretient avec le roi Arthus, dont il côtoie comme écuyer, et aime, la fille (la superbe Gwendoline)... pour comprendre le réalisme politique de la série.
Parfois bienvenu à la cour, d'autres fois (surtout au début), arrivant à être jeté au cachot pour ses écarts.

Bete yeux pers -7
Les nombreux passages féériques ne sont aussi pas les moindres dans une série plutôt bien documentée, mais dont l"univers fantastique invoque à chaque instant un suspens prenant.

En comparaison, on peut évoquer Thorgal (après "Harald" c'est LA série viking franco-belge), arrivée en 1977 dans Tintin (donc 11 ans après). Et si cette série a connu un succès méritoire, il est important de faire remarquer qu'elle doit beaucoup en originalité à son prédécesseur.
Tintin 1020
Peu de héros en 1966 possédaient en effet autant de sentiments et d'interrogations existentielles que ce personnage de Chevalier ardent. Peu de récits étaient aussi étranges et violents, bien que la poésie n'était bien sûr pas absente, bien au contraire. (voir "le Passage" entre autre)
C'est de cela dont on se rappellera en pensant à François Craenhals et à son chevalier.


(1) In "Le lombard 1946-1996 un demi siècle d'aventures tome 1" (p 203) (J. L lechat, Le Lombard)

(2) Cette réflexion était aussi (mais ce n'est pas surpenant) celle de Hugues Dayez dans le chapitre/interview consacré à Craenhals dans son excellent livre "Le duel Tintin spirou" (Le Félin 1997)

Quelques témoignages suite à la mort de l'auteur en 2004 sur :
http://www.bdparadisio.com/scripts/ForItems.cfm?IdSubject=0527093625

A lire aussi des réflexions autour de la série sur : http://lectraymond.forumactif.com/t157p30-chevalier-ardent

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Commentaires
L
Je n'en ai pas lu assez pour me fatiguer mais bon, c'était quelque chose...
H
@ Li-an : oui, c'est vrai que c'est l'effet que Ardent fait. Toujours très exagéré. Très théâtrale comme attitude. Outrancière même.<br /> <br /> Mais c'est ce qui fait aussi son charme. (et qui énerve au bout d'un moment.) Son nom avait été bien trouvé en tous les cas.
L
Tiens, je pense que j'ai lu cette histoire dans ma jeunesse. Je me rappelle surtout que le perso avait toujours une tête d'illuminé avec de grands yeux écarquillés. Je ne savais pas trop quoi en penser quand je lisais ça...
H
Et bien Raymond, je te laisse cette conclusion, car je crois qu'effectivement, on peut voir ça ainsi : rareté des bons récits, donc saveur supplémentaire.<br /> <br /> De toute façon, les pépites n'affleurent que très rarement à la surface, non ?
R
Oui ... certainement ... mais Hergé n'a dessiné qu'un seul "Popol". Craenhals, lui, a dessiné plus de 30 histoires de 4 As !<br /> <br /> Cela fait beaucoup de temps "perdu" (c'est du moins ainsi que je le vois).<br /> <br /> En tout cas, il y a maintenant beaucoup plus d'albums des 4 As que de Chevalier Ardent, hélas. Mais peut être que cette relative "rareté" est un des éléments qui donne de la valeur à la série. A l'exception de la dernière histoire (dessinée de façon tardive), la qualité des histoires de Chevalier Ardents est en effet constante.
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